Artisans du bâtiment : le PPSPS peut désormais vous concerner directement

Quelles responsabilités pèsent sur vos épaules en tant qu’artisan sur un chantier ? Parmi les documents de prévention souvent laissés de côté, le PPSPS (Plan Particulier de Sécurité et de Protection de la Santé) est longtemps resté perçu comme un formalisme réservé aux grosses structures ou aux chantiers d’envergure. 

Ce n’est qu’en partie vrai. D’autant plus que cette idée reçue a été balayée par un arrêt rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation le 15 janvier 2025. Désormais, le PPSPS s’impose à toute entreprise intervenant sur un chantier soumis à l’obligation d’établir un plan général de coordination, y compris les artisans en sous-traitance, dès lors qu’ils contribuent à la réalisation de l’ouvrage. En clair : même si vous n’êtes « qu’un sous-traitant », vous avez l’obligation de fournir un PPSPS. Et en cas d’accident, l’absence de ce document peut sérieusement vous coûter cher.

Dans cet article, je vous explique ce qu’est exactement le PPSPS, quand il devient obligatoire, comment vous mettre en conformité sans prise de tête, et surtout, ce que vous risquez si vous ne le faites pas.

Qu’est-ce que le PPSPS ? 

Le PPSPS est un document clé dans la prévention des risques sur les chantiers. Son objecti  ? Assurer la sécurité des salariés en anticipant les risques liés à la c-activité, autrement dit, la présence simultanée de plusieurs entreprises sur un même chantier.

Ce plan précise les risques identifiés (liés au chantier, aux matériaux, aux machines, à l’environnement, etc.) et surtout, les mesures de prévention mises en place pour protéger les équipes. Le PPSPS résulte de la transposition en droit français de la directive européenne 92/57/CEE du 24 juin 1992.

Le PPSPS est requis dans les opérations de BTP, de génie civil ou de construction faisant intervenir plusieurs entreprises, dès lors que le chantier entre dans l’un de ces cas de figure :

  • chantier mobilisant plus de 20 personnes à un moment quelconque des travaux et dont la durée doit excéder 30 jours ouvrés et représentant un volume supérieur à 500 hommes-jours (unité calculée en additionnant tous les jours de travail prévus pour l’ensemble des intervenants) (article R4532-2 du Code du travail) ;

  • chantier durant plus d’un an, mobilisant plus de 50 personnes pendant plus de 10 jours ouvrés consécutifs (article R4532-57 du Code du travail) ;

  • chantier concernant des activités listées dans l’arrêté du 25 février 2003, comme certains travaux à risque (amiante, travaux en hauteur, etc.).

Dès lors que le chantier entre dans ce cadre, le PPSPS doit être produit en amont du démarrage des travaux.

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Ce que dit la jurisprudence du 14 janvier 2025 impactant les artisans du bâtiment

Un arrêt récent de la Cour de cassation rendu le 14 janvier 2025 (Cass. Crim. 14 janvier 2025 n° 23-84.130) pourrait bien bouleverser les pratiques des artisans sur les chantiers. 

Dans cette affaire, un ouvrier missionné pour assurer l’entretien d’une grue sur un chantier décède lors de son intervention. Tandis que ce dernier terminait son intervention sur la grue, le grutier, pensant à tort que la zone était libre, redémarre sa machine, blessant mortellement l’agent de maintenance. Malheureusement, aucune procédure de sécurité n’avait été mise en place pour encadrer cette opération.

L’entreprise de BTP et le loueur ont été mis en cause et condamnés par la Cour d’appel de Rennes pour infraction à la réglementation sur l’hygiène et la sécurité des travailleurs, homicide involontaire et infraction à la réglementation sur l’hygiène et la sécurité des travailleurs eu égard à l’absence de PPSPS. 

Ils évoquent à l’appui de leur pourvoi qu’eu égard à la directive « chantiers temporaires ou mobiles » n° 92-57 du 24 juin 1992, transposée aux articles L. 4532-2 et suivants du Code du travail, seuls les intervenants participant à la réalisation de l’ouvrage sont concernés par l’obligation d’établir un PPSPS. Évidemment, ici, le loueur assurant la maintenance de la grue ne participait pas directement à la construction de l’ouvrage. 

La Cour fait une interprétation plus large des articles L. 4532-9 et R4532-64 du Code du travail en indiquant que l’obligation d’établir un PPSPS concerne l’ensemble des entreprises concourant à la réalisation de l’opération de construction, sans se limiter à celles participant directement à la construction

=> En conséquence, en tant qu’artisan du bâtiment, dès lors que vous intervenez sur un chantier soumis à l’obligation d’établir un plan général de coordination, vous devez établir votre propre PPSPS avant le début des travaux

Que doit contenir un PPSPS ? 

Conformément aux articles R4532-63 et suivants du Code du travail, le PPSPS doit contenir : 

  • les nom et adresse de l’entrepreneur ;

  • l’évolution prévisible de l’effectif sur le chantier ;

  • les noms et qualités de la personne chargée de diriger l’exécution des travaux ; 

  • les mesures spécifiques prises par l’entreprise pour prévenir les risques spécifiques découlant de l’exécution par d’autres entreprises de travaux dangereux et des contraintes en matière de circulations ou d’activités d’exploitation particulièrement dangereuses ; 

  • la description des travaux et des processus de travail de l’entreprise pouvant présenter des risques pour la santé et la sécurité des autres intervenants sur le chantier ; 

  • les dispositions à prendre pour prévenir les risques pour la santé et la sécurité que peuvent encourir les travailleurs de l’entreprise lors de l’exécution de ses propres travaux.

Le PPSPS doit également détailler : 

  • les dispositions en matière de secours et d’évacuation (consignes de premiers secours, nombre de travailleurs du chantier formés pour donner les premiers secours en cas d’urgence, le matériel médical existant sur le chantier, les mesures prises pour évacuer toute victime d’accident semblant présenter des lésions graves) ;

  • les mesures assurant l’hygiène des conditions de travail et celle des locaux destinés aux travailleurs. 

L’artisan doit remettre son PPSPS au coordonnateur ou au maître d’ouvrage dans les 30 jours suivant la réception du contrat signé par le maître d’ouvrage (article R4532-56 du Code du travail). 

Quels sont les risques en cas de défaut du PPSPS ? 

En cas d’absence de PPSPS, ou en cas de défaut de la remise du PPSPS au maître d’ouvrage ou au coordinateur, l’article L4744-5 du Code du travail prévoit une amende de 9000 euros, outre les sanctions pénales en cas d’accident. La récidive est punie d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros. 



Sabine Vuillermoz
Avocat au Barreau de Sens

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