Annulation devis signé | Droits, obligations et conséquences

L’affaire était conclue. Le devis était signé, le chantier programmé. Et soudain, changement de cap, votre client annule. Il ne veut plus que vous réalisiez les travaux. A-t-il le droit ? Êtes-vous obligé d’accepter l’annulation du devis signé ? 

Mais peut-être que la situation est inversée. C’est vous qui souhaitez faire marche arrière. Une belle erreur s’est glissée dans le devis, vous avez une surcharge de travail et vous n’êtes finalement pas disponible, ou un chantier plus rentable s’est présenté. Avez-vous le droit de revenir sur vos engagements ? 

Dans cet article, je vous propose de faire le point sur l’annulation du devis signé lorsque vos clients sont des consommateurs. Quelle est la valeur juridique du devis signé ? Dans quels cas peut-il être annulé par le client ou l’artisan ? Et quels sont les bons réflexes à adopter pour se protéger en cas de litige ?   

Un devis signé engage-t-il vraiment les deux parties ? 

Oui, un devis signé a une valeur contractuelle : il engage juridiquement les deux parties. Lorsque vous établissez un devis, vous formulez en réalité une offre de contrat. Cette offre précise les conditions essentielles de votre future intervention : nature des travaux, délais, prix, modalités de règlement, etc. 

À partir du moment où votre client signe ce devis, il accepte votre proposition. Et cette acceptation vaut engagement ferme. Pour vous, cela signifie que vous vous engagez à réaliser les travaux convenus, dans les délais et selon les conditions indiquées. Pour votre client, cela signifie qu’il s’engage à vous payer selon les modalités prévues (acompte, solde, etc.).

Aux termes de l’article 1103 du Code civil, « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». Autrement dit, le devis signé tient lieu de contrat. C’est ce document qui encadrera juridiquement la relation en cas de litige.

Exception importante : si vous et votre client êtes tous les deux d’accord pour entériner l’annulation du devis signé, il n’y a alors aucun problème. Il est tout à fait possible de renoncer au chantier à l’amiable, à condition que cette décision soit clairement formulée (et si possible, formalisée par écrit pour éviter toute contestation).

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Dans quels cas le client peut-il annuler un devis signé ? 

Si le droit de rétractation s’applique

Dans certains cas, votre client peut légalement revenir sur sa décision, même après avoir signé le devis. C’est le cas du droit de rétractation. 

Selon l’article L221-18 du code de la consommation, un particulier (consommateur) dispose d’un délai de 14 jours pour se rétracter sans justification, à condition que le contrat ait été conclu :

  • à distance (par e-mail, courrier, téléphone…) ;

  • ou hors établissement (c’est-à-dire en dehors de votre lieu d’activité habituel).

Concrètement, si vous vous rendez chez votre client pour lui faire signer le devis, ou s’il le signe suite à un envoi par mail, le droit de rétractation s’applique. Il a alors 14 jours pour changer d’avis et demander l’annulation du devis signé, sans avoir à se justifier ni à vous verser quoi que ce soit.

Attention, ce droit ne s’applique que si votre client est un particulier, donc un consommateur aux yeux de la loi. Il ne concerne donc pas les professionnels ni les personnes morales

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Dans les autres cas de figure

Ce n’est pas légal. Nous l’avons vu, un devis signé engage les deux parties, et votre client ne peut pas simplement se désister en demandant l’annulation du devis signé sans raison valable. Pour autant, certaines exceptions bien encadrées par la loi existent. 

Votre client peut annuler le devis si vous n’exécutez pas les travaux dans le délai convenu. Mais attention, cela ne peut se faire que dans un cadre précis :

  1. Le client doit d’abord vous mettre en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR), en vous accordant un nouveau délai raisonnable pour intervenir.

  2. Si vous ne respectez pas ce nouveau délai, le client est alors en droit de résilier le contrat. Il doit vous en informer par écrit, et la résiliation sera effective à la réception de son courrier.

En cas de conflit, c’est au client de prouver le retard. Et si aucun délai n’a été précisé dans le devis, l’article L216-1 du Code de la consommation prévoit que la prestation doit être réalisée dans un délai maximum de 30 jours après la signature du devis, sauf accord contraire avec votre client.

En cas de litige, les juges prennent en compte de façon constante la notion de « délai raisonnable », qui dépend de la nature des prestations à accomplir ou de leur complexité.

Si c’est vous qui souhaitez annuler le devis 

Cela peut arriver. Vous avez envoyé un devis, mais vous vous êtes rendu compte a posteriori qu’une erreur s’était glissée dans le document. Plus inattendu, vous ne souhaitez finalement pas honorer ce chantier, pour des raisons qui vous appartiennent. Quelles sont vos options dans ce cas ?

Vous avez repéré une erreur dans le devis

Il arrive que le devis comporte une erreur (sur la TVA applicable, sur les références, sur les quantités, sur les prix, etc.). Selon le moment où vous vous en rendez compte, la marche à suivre change :

  • Si le devis n’a pas encore été signé, vous pouvez simplement envoyer un devis corrigé, en expliquant la rectification au client.

  • En revanche, si le devis a déjà été accepté et que l’erreur est en votre défaveur, vous pouvez choisir d’assumer l’erreur pour préserver la relation client. Si l’erreur est en défaveur du client, il est impératif de le prévenir et de soumettre une version corrigée pour approbation.

Dans les deux cas, mieux vaut agir vite et de manière transparente. Plutôt que d’annuler tout le devis, vous pouvez également proposer un avenant à votre client. Il s’agit d’un document modifiant certaines clauses du devis initial sans le remettre totalement en cause. Il doit être signé par les deux parties pour être valable.

Vous souhaitez purement et simplement annuler le devis

Si vous vous retrouvez dans l’impossibilité de réaliser les travaux, sachez que le devis signé vous engage contractuellement. Une annulation unilatérale de votre part du devis signé aura des conséquences :

  • Vous devez rembourser intégralement l’acompte éventuellement perçu.

  • Le client peut exiger des dommages et intérêts si cette annulation lui cause un préjudice.

Dans tous les cas, privilégiez toujours la discussion amiable avec votre client, et formalisez tout accord par écrit pour éviter tout litige ultérieur.

Annulation devis signé par le client | Quelles conséquences ? 

Si vous n’êtes pas intervenu sur le chantier et que votre client a annulé le devis, vous devrez lui rembourser les sommes versées au plus tard dans les 14 jours suivant la date à laquelle le contrat a été dénoncé

À défaut, cette somme est majorée de plein droit de 10 % si le remboursement intervient au plus tard trente jours au-delà de ce terme, de 20 % jusqu’à soixante jours et de 50 % ultérieurement.

En revanche, si votre client a injustement annulé le devis, vous pouvez faire valoir vos droits :

  • Si votre client n’a pas versé d’acompte, vous pouvez demander des dommages-intérêts pour le préjudice subi (fournitures commandées, heures travaillées, main-d’œuvre mobilisée, etc.).

  • Si votre client a versé un acompte, il s’agit du premier versement pour la prestation de services. Vous êtes donc en droit de conserver l’acompte, et de réclamer des dommages-intérêts en plus.

  • Si votre client a versé des arrhes, contrairement à l’acompte, les arrhes permettent une annulation du contrat. Si le client annule, vous pouvez conserver les arrhes, mais vous ne pouvez pas demander plus. 

💡 Pensez donc à toujours bien préciser clairement sur vos CGV et sur vos devis s’il s’agit d’un acompte ou d’arrhes ! 

Proposer un devis n’est donc pas une simple formalité ! C’est un véritable contrat qui engage les deux parties. Une annulation, qu’elle soit de votre fait ou de celui de votre client, peut donc avoir des conséquences juridiques et financières importantes.

Avant d’envoyer vos devis, prenez le temps de :

  • Vérifier l’ensemble des éléments : les prix, les références, les quantités et les conditions d’exécution.

  • Préciser la nature des sommes versées (acompte ou arrhes). 

En cas de litige, c’est souvent le devis et vos écrits qui feront foi. D’où l’importance de soigner votre cadre juridique dès le départ pour éviter les mauvaises surprises.

💡 Vous souhaitez obtenir des conseils personnalisés sur votre situation ? Je vous accompagne avec plaisir, prenez directement rendez-vous en ligne !



Sabine Vuillermoz
Avocat au Barreau de Sens

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