Quelles sont les exceptions au droit de rétractation ?
Quelles sont les exceptions au droit de rétractation ? C’est une question que beaucoup d’entrepreneurs se posent lorsque, après avoir signé un devis ou validé une commande, un client décide de changer d’avis.
En principe, la loi accorde aux consommateurs un délai de 14 jours pour revenir sur leur engagement, notamment pour les ventes conclues à distance, à domicile ou à la suite d’un démarchage. Mais ce droit n’est pas illimité. La réglementation prévoit plusieurs situations bien précises dans lesquelles le client ne peut pas se rétracter, même s’il le souhaite.
Comprendre ces exceptions est essentiel pour sécuriser vos contrats, anticiper les litiges et protéger la rentabilité de votre activité. Dans cet article, nous faisons le point sur les exceptions au droit de rétractation, avec des exemples concrets pour mieux les comprendre.
Les exceptions légales au droit de rétractation
Même si le droit de rétractation est la règle, il existe plusieurs cas où le client ne peut plus changer d’avis. La loi a listé les exceptions au droit de rétractation aux termes de l’article L221-28 du Code de la consommation.
1. Les travaux ou prestations déjà réalisés à la demande du client avant la fin du délai de rétractation
Cette première exception au droit de rétractation paraît évidente, mais elle est bien écrite noir sur blanc dans le Code de la consommation. Si votre client vous demande de commencer vos travaux avant la fin du délai de rétractation, il ne pourra plus se rétracter une fois la prestation terminée.
👉 Exemple : vous intervenez chez un client pour une réparation de plomberie assez simple et rapide. Le client vous appelle, vous signez le devis chez lui et il insiste pour que vous commenciez tout de suite. Une fois la réparation effectuée, il ne pourra pas invoquer le droit de rétractation pour annuler et refuser de payer, et heureusement !
2. Les biens ou services dont le prix dépend de fluctuations sur le marché
Le droit de rétractation ne s’applique pas lorsque le prix d’un bien ou d’un service dépend de variations du marché échappant au contrôle du professionnel. L’idée est simple, si le prix peut évoluer rapidement, à la hausse ou à la baisse en fonction de facteurs externes, il n’est pas possible pour le consommateur de bloquer ou annuler l’opération a posteriori.
👉 Exemple : un entrepreneur qui vend des matériaux dont le prix dépend des cours internationaux. Une fois la commande passée, le client ne peut pas se rétracter au motif que le prix a changé.
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3. Les biens nettement personnalisés ou faits sur mesure
Ici aussi, le législateur a fait preuve de bon sens, puisqu’un client ne peut pas se rétracter sur une commande a été fabriquée spécialement pour lui. Il est évident qu’un produit fait sur mesure ou personnalisé ne peut pas être revendu tel quel à un autre acheteur, donc il n’y a pas de retour en arrière possible.
👉 Exemple : vous êtes menuisier et vous réalisez une bibliothèque aux dimensions exactes d’un salon. Ou encore, vous commandez une porte taillée sur mesure pour s’adapter à un encadrement particulier. Dans ces cas-là, le client est engagé, il ne peut pas annuler une fois la fabrication lancée.
4. Les biens qui se détériorent ou se périment rapidement
Pas de retour en arrière non plus lorsqu’il s’agit de produits fragiles ou à durée de vie très limitée. Le droit de rétractation ne s’applique pas, car il serait impossible de garantir leur qualité ou leur sécurité après restitution.
👉 Exemple : vous vendez des produits de traitement dont la conservation est limitée, vos clients ne peuvent pas se rétracter.
5. Les biens descellés par le consommateur qui ne peuvent plus être renvoyés pour des raisons d’hygiène ou de protection
Ici encore, la logique prime. Certains produits, une fois déballés, ne peuvent plus être revendus en raison des règles d’hygiène ou de sécurité.
👉 Il s’agit notamment des équipements sanitaires ou des matériels de protection individuelle par exemple.
6. Les biens qui ont été mélangés de manière indissociable avec d’autres articles
Il s’agit des produits ou matériaux qui, une fois livrés, sont mélangés ou incorporés de façon définitive à d’autres biens. Impossible, dans ce cas, de les restituer sans causer de dommages. Le droit de rétractation ne s’applique donc pas.
👉 Exemple : un mélange de matériaux incorporés à une structure. Pour un fournisseur de matériaux, cela signifie que si la marchandise a été utilisée/posée et qu’elle ne peut être extraite sans dommage, il n’y a pas de rétractation possible.
7. La fourniture de boissons alcoolisées dont la livraison est différée
Le droit de rétractation ne s’applique pas pour les ventes de boissons alcoolisées dont la livraison est prévue au-delà de 30 jours après la commande et dont le prix dépend de fluctuations de marché indépendantes du vendeur.
👉 Exemple : un caviste en ligne vend une caisse de vin millésimé avec livraison différée. Si la valeur varie en fonction du marché, le client ne peut pas se rétracter.
8. Les réparations ou travaux d’entretien urgents
Lorsqu’un client fait appel à vous pour une intervention d’urgence immédiate à son domicile (fuite, panne électrique, dégât des eaux…), il ne peut pas utiliser le droit de rétractation une fois la prestation réalisée. En d’autres termes, le droit de rétractation ne joue pas pour les interventions demandées en urgence et exécutées intégralement.
👉 Exemple : vous êtes électricien, vous êtes contacté en urgence pour réparer un compteur tombé en panne. Le client vous a demandé d’agir immédiatement, il ne peut pas annuler après l’intervention et invoquer son droit de rétractation pour ne pas vous payer.
9. Les enregistrements audio ou vidéo ou logiciels informatiques descellés
Les supports physiques (CD, DVD, clés USB contenant un logiciel, etc.) perdent leur droit de rétractation si le consommateur les a retirés de leur emballage scellé après la livraison.
👉 Exemple : un éditeur qui vend un logiciel sur clé USB. Une fois l’emballage ouvert, plus de rétractation possible.
10. La vente de journaux, périodiques ou magazines
La fourniture ponctuelle d’un journal ou magazine n’ouvre pas droit à rétractation. En revanche, les contrats d’abonnement y restent soumis, sauf clauses particulières.
👉 Exemple : un numéro unique acheté sur une librairie en ligne ou en kiosque ne peut pas être annulé. En revanche, un abonnement à un hebdomadaire peut ouvrir droit à rétractation selon les conditions prévues.
11. Les contrats conclus lors d’une enchère publique
Lorsqu’un achat est effectué dans le cadre d’une vente aux enchères publiques, le consommateur ne bénéficie pas du droit de rétractation.
👉 Exemple : un consommateur qui acquiert du mobilier ou un véhicule lors d’une vente aux enchères n’a pas la possibilité de revenir sur sa décision.
12. Les prestations d’hébergement devant être fournies à une date ou une période déterminée
Les services liés à l’hébergement (autre que résidentiel), au transport de biens, à la location de voitures, à la restauration ou aux activités de loisirs devant être fournis à une date précise ne sont pas soumis au droit de rétractation.
👉 Exemple : un hôtelier qui loue un gîte pour un week-end précis.
13. La fourniture de contenu numérique sans support matériel
La fourniture de contenu numérique dématérialisé, comme une formation en ligne, un fichier téléchargeable, ou encore une licence logicielle, n’est pas soumise au droit de rétractation si l’exécution a commencé avant la fin du délai de 14 jours et que le consommateur a expressément accepté de perdre son droit de rétractation.
Autrement dit, le consommateur doit être clairement informé et avoir consenti au démarrage immédiat du service.
👉 Exemple : achat d’une formation en ligne accessible immédiatement après paiement.
Focus spécial artisans du bâtiment : les exceptions au droit de rétractation qui peuvent vous impacter directement
Toutes les exceptions listées par la loi ne s’appliquent pas à votre activité. Mais certaines concernent directement les artisans du bâtiment, et il est important de bien les connaître pour éviter les litiges avec vos clients.
Les travaux ou réparations urgentes
C’est sans doute la situation la plus fréquente. Un client vous appelle pour une fuite d’eau, une panne électrique ou un dégât des eaux. Évidemment, la situation est grave, et votre client est stressé. Rien de plus normal. Vous intervenez immédiatement, souvent sur devis signé sur place. Dans ce cas, le client ne peut pas se rétracter après coup, même si les 14 jours ne sont pas écoulés.
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Les biens personnalisés ou sur mesure
Certaines de vos prestations peuvent impliquer la conception et la pose de matériaux ou d’équipements conçus spécialement pour un chantier. Menuiserie sur mesure, fenêtres aux dimensions spécifiques, cuisine adaptée à un plan particulier, les exemples ne manquent pas. Dans ces cas, le client ne peut pas annuler sa commande au titre du droit de rétractation.
Les matériaux incorporés ou indissociables
Une fois posés, certains matériaux ne peuvent pas être repris. C’est notamment le cas des parquets collés, du carrelage fixé, de l’isolation projetée, etc. Ici encore, le droit de rétractation ne joue pas. Une fois le produit livré et intégré au chantier, il n’est plus possible pour le client de revenir en arrière.
Les biens qui se périment rapidement
Certains produits de traitement ou de finition ont une durée de conservation limitée. Là aussi, le droit de rétractation est exclu, car ces produits ne peuvent pas être repris ni revendus.
En résumé, en tant qu’artisan du bâtiment, vous pouvez être régulièrement confronté aux exceptions au droit de rétractation. N’hésitez pas à bien l’expliquer à vos clients dès la signature du devis, ce qui vous permettra d’éviter bien des discussions par la suite.
Vous savez désormais quelles sont les exceptions au droit de rétractation et dans quels cas vos clients sont définitivement tenus par leur engagement. Ces situations, souvent méconnues, peuvent vite devenir sources de tensions si elles ne sont pas clairement encadrées.
Le bon réflexe ? Anticiper. Intégrez des clauses précises dans vos CGV, précisez dans vos devis lorsque le droit de rétractation ne s’applique pas, et conservez toujours une trace écrite de vos échanges avec vos clients. C’est le meilleur moyen d’éviter les mauvaises surprises et de protéger juridiquement votre activité.
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Sabine Vuillermoz
Avocat au Barreau de Sens