L’avenant au devis | Tout ce qu’il faut savoir

Le chantier avance bien, et puis soudain, tout bascule. Votre client change d’avis sur la couleur de la peinture. Vous découvrez un problème d’humidité qui nécessite des travaux supplémentaires. Le coût des matériaux a explosé depuis la signature du devis. Ou encore, votre client vous demande d’ajouter une prestation qui n’était pas prévue initialement.

Dans tous ces cas de figure, une question se pose. Pouvez-vous modifier le devis signé ? Et si oui, comment le faire dans les règles pour vous protéger juridiquement ?

La réponse tient en un mot, l’avenant. C’est un outil juridique essentiel que tout artisan doit maîtriser pour sécuriser ses chantiers et éviter les litiges. Dans cet article, je vous explique tout ce qu’il faut savoir sur l’avenant au devis : quand l’utiliser, comment le rédiger, et surtout, quels pièges éviter absolument.

Qu’est-ce qu’un avenant au devis ?

Définition juridique de l’avenant

Un avenant est un document contractuel qui vient modifier un contrat existant, en l’occurrence, votre devis initial. Il ne remplace pas le devis d’origine, mais le complète ou l’ajuste sur certains points précis

Selon l’article  1103 du Code civil, « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont fait  ». Juridiquement, l'avenant a donc la même valeur que le contrat initial

L’avenant permet ainsi d’adapter le contrat en cours de route, sans avoir à tout recommencer de zéro. C’est un outil de souplesse, mais aussi de sécurité juridique, à condition de respecter certaines règles.

Avenant ou nouveau devis : quelle différence ?

La distinction est importante. Un avenant modifie un contrat existant, tandis qu’un nouveau devis crée une nouvelle relation contractuelle. Concrètement :

👉 Vous devez faire un avenant si les modifications concernent le même chantier, avec le même client, et que le contrat initial reste globalement valable. Par exemple : ajout d’une pièce à peindre, modification de la nature d’un revêtement, travaux supplémentaires découverts en cours de chantier. L’avenant est nécessaire dès qu’un élément du devis initial change (prix, délais d’exécution, matériaux utilisés, quantités prévues, etc.). Sans avenant signé, vous ne pouvez pas modifier les conditions du contrat. Et en cas de litige, c’est le devis initial qui fera foi.

👉 Vous devez faire un nouveau devis si les modifications sont tellement importantes qu’elles changent la nature même du projet. Par exemple : votre client vous demandait de rénover une salle de bain et finalement, il veut refaire toute la cuisine. Dans ce cas, mieux vaut partir sur un devis distinct.

💡 À lire aussi : Annulation devis signé | Droits, obligations et conséquences

Dans quelles situations devez-vous établir un avenant ?

À l’initiative du client

Modifications demandées en cours de chantier

Votre client change d’avis. C’est classique. Il voulait du carrelage beige, finalement il préfère du gris anthracite. Ou bien il souhaite déplacer une cloison de quelques mètres. Tant que le chantier n’est pas terminé, il a le droit de demander des modifications.

Mais attention, vous n’êtes pas obligé d’accepter toutes ses demandes, surtout si elles compliquent considérablement votre organisation ou vos délais. Si vous acceptez, un avenant est indispensable pour formaliser ces changements, et d’autant plus s’ils ont un impact sur le prix. 

Prestations supplémentaires

Votre client vous demande d’ajouter une prestation qui n’était pas prévue dans le devis initial. Par exemple, vous deviez poser du parquet dans le salon, et il vous demande aussi de le faire dans la chambre. Ou vous deviez repeindre une pièce, et il souhaite que vous en fassiez une deuxième.

Même si cela vous semble être « juste un petit plus », vous devez établir un avenant. Pourquoi ? Parce que sans avenant signé, vous ne pourrez pas facturer ces prestations supplémentaires, même si vous les avez réalisées.

À votre initiative

Découverte de problèmes techniques imprévus

C’est l’une des situations les plus fréquentes dans le bâtiment. Vous commencez les travaux et vous découvrez un problème qui n’était pas visible lors de l’établissement du devis : humidité dans les murs, électricité vétuste, structure fragilisée, etc.

Ces travaux supplémentaires sont indispensables pour mener à bien le chantier dans les règles de l’art. Mais ils n’étaient pas prévus dans le devis initial. Vous devez donc établir un avenant pour intégrer ces nouvelles prestations et ajuster le prix en conséquence.

💡 Mon conseil : Prenez systématiquement des photos et documentez ces imprévus. En cas de contestation, vous devrez prouver que ces travaux n’étaient pas prévisibles.

Travaux supplémentaires indispensables

Parfois, en cours de chantier, vous vous rendez compte que certains travaux sont nécessaires pour garantir la qualité de votre intervention. Là encore, un avenant s’impose. Vous devez expliquer à votre client pourquoi ces travaux sont indispensables, et obtenir son accord écrit avant de les réaliser.

Augmentation du coût des matériaux

Si votre devis contient une clause d’indexation (c’est-à-dire une clause prévoyant une révision du prix en fonction de l’évolution du coût des matériaux), vous pouvez répercuter cette hausse sur le prix final. Mais cette augmentation doit être formalisée par un avenant.

En revanche, si votre devis ne prévoit pas de clause d’indexation, vous ne pouvez pas augmenter le prix unilatéralement, même si vos coûts ont explosé. C’est pour cette raison qu’il est essentiel d’anticiper en incluant une telle clause dans vos conditions générales de vente.

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Situations où l’avenant n’est PAS nécessaire

Corrections mineures

Si vous devez corriger une simple erreur matérielle dans le devis (une faute de frappe, une référence produit erronée, etc.) et que cela n’a aucun impact sur le prix, les délais ou la nature des prestations, un avenant n’est pas nécessaire. Une simple note ou un courrier de rectification suffit.

Erreurs manifestement en votre défaveur

Si vous vous êtes trompé dans le calcul du prix et que l’erreur est manifestement en votre défaveur, vous ne pouvez généralement pas imposer un avenant pour augmenter le prix. Le devis signé vous engage. C’est la raison pour laquelle il est essentiel de bien vérifier vos devis avant de les envoyer.

💡 À lire aussi : Mettre en place un processus client pour sécuriser son chiffre d’affaires d’artisan

Comment rédiger un avenant au devis conforme ?

Les mentions obligatoires d’un avenant

Un avenant doit être aussi précis que le devis initial. Voici les mentions indispensables à faire figurer :

  • Référence au devis initial : vous devez mentionner clairement le devis que vous modifiez (numéro de devis, date de signature, montant initial).

  • Date de l’avenant : comme pour tout document contractuel, la date est essentielle.

  • Identification des parties : vos coordonnées complètes et celles de votre client.

  • Nature précise des modifications : décrivez en détail ce qui change par rapport au devis initial. Soyez aussi précis que dans le devis : nature des travaux supplémentaires, quantités, matériaux, etc.

  • Impact sur le prix : indiquez clairement le montant de l’augmentation ou de la diminution. Mentionnez le nouveau prix total HT et TTC, en précisant le taux de TVA applicable.

  • Impact sur les délais : si les modifications entraînent un décalage du planning, vous devez l’indiquer et préciser la nouvelle date de fin de travaux.

  • Nouvelles conditions de paiement si nécessaire : si le montant des travaux augmente, vous pouvez prévoir un nouvel échéancier de paiement ou demander un acompte complémentaire.

La forme de l’avenant

L’avenant doit impérativement être établi par écrit. Aucune modification orale ne peut être opposable en cas de litige. Même si votre client vous dit « oui, pas de souci, on fait comme ça », vous devez systématiquement formaliser cet accord par écrit.

L’avenant peut prendre la forme :

  • D’un document spécifique intitulé « Avenant au devis n°… ».

  • D’un nouveau devis mentionnant explicitement qu’il s’agit d’un avenant.

L’acceptation par les deux parties

Un avenant n’est valable que s’il est signé par les deux parties. Comme pour le devis initial, votre client doit apposer la mention « bon pour accord » ou « bon pour travaux » suivie de sa signature et de la date.

Tant que l’avenant n’est pas signé, vous ne devez pas commencer les travaux supplémentaires. En cas de litige, si vous avez réalisé des prestations sans avenant signé, vous aurez du mal à obtenir leur paiement.

Conseils pratiques pour une rédaction efficace

👉 Soyez clair et précis : évitez les formulations vagues du type « travaux supplémentaires divers ». Détaillez exactement ce qui change.

👉 Justifiez les modifications : expliquez pourquoi l’avenant est nécessaire, surtout si les modifications viennent de vous (problème technique découvert, etc.).

👉 Faites référence aux échanges antérieurs : si vous avez eu des discussions par mail ou par téléphone avec votre client, mentionnez-les dans l’avenant pour prouver que vous avez informé votre client en amont.

👉 Conservez une copie : gardez toujours une copie signée de l’avenant dans votre dossier client.

Les pièges à éviter avec les avenants au devis

Travailler sans avenant signé

C’est le piège numéro un. Votre client vous dit « oui, pas de problème, on verra ça plus tard », et vous commencez les travaux supplémentaires en pensant que tout est réglé. Sauf qu’au moment de la facture, votre client refuse de payer ces prestations au motif qu’il n’a jamais signé d’avenant.

Résultat : vous avez travaillé pour rien, et vous aurez du mal à obtenir gain de cause devant un tribunal. La règle d’or : pas de travaux supplémentaires sans avenant signé.

Multiplier les avenants

Si vous multipliez les avenants (un pour chaque petite modification), vous risquez de perdre en crédibilité auprès de votre client. Cela peut aussi donner l’impression que vous n’avez pas bien préparé votre devis initial.

💡 Mon conseil : Si plusieurs modifications mineures interviennent en même temps, regroupez-les dans un seul avenant plutôt que d’en faire plusieurs.

Ne pas documenter les raisons des modifications

Surtout lorsque les modifications viennent de vous (problème technique imprévu, travaux supplémentaires indispensables), vous devez impérativement documenter la situation : photos, constats, échanges avec le client, etc.

En cas de litige, ces éléments de preuve seront essentiels pour justifier que l’avenant était légitime et que vous n’avez pas cherché à gonfler artificiellement la facture.

Oublier de mettre à jour les délais

Si l’avenant prévoit des travaux supplémentaires, il est fort probable que cela ait un impact sur vos délais de réalisation. N’oubliez pas de mentionner ce décalage dans l’avenant, sinon vous risquez d’être considéré en retard par rapport au devis initial.

Ne pas conserver les preuves

Conservez précieusement tous vos avenants signés, ainsi que tous les échanges (mails, SMS, courriers) qui ont conduit à leur établissement. En cas de litige, ce sont ces documents qui feront foi.

En résumé : 

L’avenant au devis est un outil juridique essentiel qui vous protège en cas de modification du contrat initial. Il sécurise à la fois vos intérêts et ceux de votre client, en formalisant par écrit ce qui a été convenu.

Les règles d’or à retenir :

✅ Pas de travaux supplémentaires sans avenant signé ! 

✅ Soyez précis et transparent dans la rédaction. 

✅ Documentez systématiquement les raisons des modifications. 

✅ Conservez tous vos avenants et échanges. 

En respectant ces principes, vous éviterez la grande majorité des litiges liés aux modifications de devis. Et si jamais le dialogue avec votre client devient difficile, n’hésitez pas à vous faire accompagner par un professionnel du droit.

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Sabine Vuillermoz
Avocat au Barreau de Sens

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